mercredi 7 octobre 2015

Benoit Arseneau, père, un homme de tête et de coeur

Benoit Arseneau, père, ca 1996, Fonds AP1-1812b
BENOIT ARSENEAU, père
UN HOMME DE TÊTE ET DE CŒUR

Benoit Arseneau, père, n’est plus. L’homme qui a été maire de la Municipalité de Havre-aux-Maisons de 1977 à 1986 et de 1989 à 1997, et assumé durant deux ans les fonctions de préfet a succombé avant minuit le 6 octobre, à l’âge de 78 ans, à la suite d'une longue maladie. 

Son père Fabien fut lui-même maire de 1951 à 1958, ce qui peut aider à comprendre un peu le destin du fils. Cette période effervescente aux Îles-de-la-Madeleine était celle de la construction de la route principale reliant Havre-Aubert, de l’installation de l’électricité, l’apparition des chalutiers, l’ouverture d’une usine de poisson par la Gorton Pew, le premier lien maritime entre Montréal et les Îles avec le Brion, de CTMA, etc. Benoit Arseneau a pu voir œuvrer son propre père au développement de son milieu et, témoin de l’impact des décisions municipales sur celui-ci, a pu recevoir la piqûre de la politique à ce moment. Paradoxalement, sa propre élection se fera en pleine crise des travailleurs de l’usine de Pêcheurs-Unis du Québec, en novembre 1977.

Après le déclin du hareng de 1950 à 1970, une importante source de revenus de plusieurs familles aux Îles, dont la sienne qui exploitait des fumoirs depuis des décennies, il est entré dans l’arène politique avec des convictions et dans l’idée de tout faire pour aider sa communauté à progresser. Mais avant d’être élu, il fut membre de la Commission des loisirs, marguillier à la paroisse Sainte-Madeleine. Bénévole de longue date et doté d’un bon sens de l’humour et d’une direction hors de l’ordinaire, il était revenu d’un voyage à Québec en 1958 avec l’idée d’un carnaval pour la Municipalité de Havre-aux-Maisons. Cette activité, très populaire et rassembleuse, laissa sa marque dans le monde des loisirs sur l’ensemble des Îles. Les résidents de Pointe-aux-Loups, localité fusionnée à Havre-aux-Maisons dès son arrivée comme maire, furent sollicités et participèrent également à ces festivités durant de nombreuses années. Il faut dire que l’homme savait convaincre et témoignait tout son respect pour sa communauté. Plusieurs l’auront vu assister à la messe hebdomadaire de leur église et les soutenir durant leurs propres efforts de levées de fonds ou développement (comité des loisirs, glace extérieure, marina, etc.)

Durant son mandat, on note le complexe municipal avec l'aréna et sa glace artificielle, la Maison de la Culture, un système d'égouts, le centre régional de traitement des matières résiduelles, le développement de la marina de la Pointe, les haltes routières et le sentier pédestre du Cap Rouge.  Alors que les années 70 voyaient la croissance du tourisme influencer le développement des Îles, jusque- là orientée par le Plan d’aménagement de l’Est-du-Québec, la dernière période de son mandat fut marquée par un climat économique difficile, le moratoire sur le poisson de fond, les activités de mesures d’urgence lors de l’effondrement survenu à Mines Seleine, les problèmes liés au transport maritime et aérien, etc.

Benoit Arseneau était un homme de cœur. Lorsqu’il quitte la vie politique à l’âge de 62 ans, il remercie avec émotion ses collègues des dernières années ainsi que les membres du personnel de sa municipalité et de la MRC des Îles dont il dira regretter ces personnes tant dévouées à la cause municipale. Ayant siégé à plusieurs comités, dont celui des transports, il jugeait son expérience enrichissante. « J'ai réussi, je crois, à maintenir le cap et à prendre les décisions importantes pour l'aboutissement de certains dossiers. »  Il était particulièrement fier de l’implantation du compostage aux Îles, une réalité qu’il savait devoir se réaliser dans un contexte d'environnement insulaire.

L’homme au langage coloré savait que pour arriver à un consensus, il fallait parfois se rallier à ses pairs dans des décisions importantes. Il estimait que la position de préfet demandait une bonne dose de courage et de détermination. Lors d’un hommage, en avril 1998, les bénévoles de sa municipalité mentionnaient comment il sut se faire apprécier et admiraient sa capacité de gérer des crises et conduire des dossiers.

Son départ de la vie politique était conjugué à sa volonté de faire revivre l’industrie du hareng avec le fumoir qu’il a reconstruit avec ses fils, Louis, Benoit et Daniel. Le hareng frayait un peu plus sur nos côtes et il pouvait retourner au métier traditionnel familial tout en conservant le contact avec le public qu’il affectionnait. Mis à part les dernières années marquées par la maladie, il assistait ses fils dans leur travail au Fumoir d’Antan depuis presque 20 ans. Nul doute qu’il aura été un ambassadeur pour les Îles et contribué à faire perpétuer les traditions et métiers de notre monde insulaire.



Sources :

Journal Le Radar, 12 septembre 1997 p. 3
Journal Le Radar, 19 septembre 1997, p. 2, 9, 11
Journal Le Radar, 24 avril 1998, p.12
Témoignage d’ancien membre de la MRC des Îles
Recherches du Centre d’archives régional des Îles