La goélette
L’Espérance fait naufrage au Cap Breton, le 17 novembre 1875. Propriété de
David Lapierre, cette goélette fut construite aux Îles-de-la-Madeleine. Partie
d’Halifax vers les Îles, elle a terminé sa course près des rochers de Chimney
Corner (Inverness Country). Les survivants ont dû gravir les rochers abrupts du
lieu du naufrage. Une lettre de Wilfrid Renaud [1],
petit fils du survivant Théodore Renaud, permet de préciser des détails
de la tragédie. Il en est de même par la lecture du Huitième rapport annuel de la Marine
et des Pêcheries pour l’année 1875. Selon les dires du survivant, L’Espérance
avait à son bord 8 membres d’équipage. Le rapport annuel en mentionne 12. La
goélette appartenait au capitaine David Lapierre, un jeune célibataire.
Liste des décès de L’Espérance :
- Dominique
GAUDET, époux de Sophronie Briand
- Joseph-Théodore
RENAUD, époux de Victoire BOUDREAU et oncle de l’autre Théodore Renaud, qui a
survécu
- Noël LEBEL,
époux de Pélagie CHIASSON et père de Daniel Lebel[2
- David
Lapierre, capitaine
- Hilaire
Doucet, fils de Antoine Doucet, âgé de 18 ans
Liste des
survivants de L’Espérance :
- Théodore
Renaud, grand-père du témoin Wilfrid.
- Onézime
Gaudet, frère de Dominique et beau-père de William Vigneau
- Casimir
Arseneau, grand-père de Maria, épouse d’Avila Chevrier
Théodore
Renaud a raconté plusieurs fois à son petit-fils le récit de ce naufrage. Il
est décédé en 1929 alors que Wilfrid avait 15 ans. Une partie de son récit
apparait tel que dans la lettre du 19 mai 1986, adressée à
son cousin Léopold Brophy :
Vers 4 heures du matin au moment du naufrage grand-père, Noël Lebel et
Hilaire Doucet étaient en bas. Noël Lebel n’a pas voulu monter sur le pont, il
a préféré mourir en bas et Hilaire Doucet a resté avec lui. Mon grand-père ne
savait pas nager, il a monté en haut. Au même instant un brisant l’a jeté à la
mer et un autre l’a jeté sur les galets, ils se sont retrouvés tous les trois
ensemble, lui, Onézime G. et Casimir Arseneau, dans le cap avec la mer à leur
verser sur le dos et en pensant aux autres. Ils ont passé 2 heures là. Le temps
était long, pensant d’être emporté d’un instant à l’autre par les vagues. Vers
6 h du matin, ils ont monté. Casimir un petit bout, ensuite Onézime Gaudet,
et c’est mon grand-père qui a monté le dernier et avec assez de misère. Ils ont
réussi étape par étape à monter sur le cap (…) C’était à Magaret Cap-Breton qu’ils
ont fait naufrage et Avila Chevrier m’a raconté que ton grand-père Léoni P
Gaudet avait été là qu’il avait acheté une tombe et l’avait fait poser au
cimetière. Je te promets que si j’ai encore l’occasion de passer par-là j’irai
voir si je peux retrouver des souvenirs.
Ton ami Wilfrid
P.S. Raconté par Théodore Renaud à Avila Chevrier 90 ans et à son
petit-fils Wilfrid qui a 72 ans.

Documents de la session de la Puissance du Canada- 1876, (Volume 9, no.4, Documents de la session 5) page 51/315
STELLA
MARIS – goélette de 52 tonneaux (6 pertes de vie)
La goélette à deux mâts, Stella Maris, fait naufrage le même jour à
Grande-Anse, Cap-Breton, en partant d’Halifax vers les Îles. Ce bateau,
construit également aux Îles deux ans plus tôt, était la propriété de Zéphirin
Arseneau, de Pointe-Basse. La Stella Maris fut
retrouvée renversée, la quille en l’air, sur le côté d’un rocher. Ses écoutilles
étaient fermées et son cargo intact, mais malheureusement, les six ou sept
membres de l’équipage furent trouvés sans vie sur la plage. Nous n’avons pas
ces noms, absents des registres.
Documents de la session de la Puissance
du Canada- 1876, (Volume 9, no.4, Documents de la session 5) page
50/315
PRESIDENT – goélette de 40 tonneaux (6 pertes de
vie)
Propriété
de Jean-Baptiste Painchaud et construite à La Heve, N.É., elle sombre le 11
novembre 1875 à Grande-Anse, Cap-Breton, en se rendant à Halifax. On déplore le
décès des 7 membres d’équipage. Une pierre tombale, gravée au nom des naufragés
de Havre-aux-Maisons, fut installée dans le cimetière de Pleasant Cove en
Nouvelle-Écosse. La pierre se trouve près
de la baie où la goélette a fait naufrage.
L’histoire
de cette tragédie se trouve dans le livre de Paul Hubert : Les Iles de la Madeleine
et les Madelinots. On retrouve également une description en anglais par Dennis
M. Boudreau, descendant d’un des marins décédés, Samuel Cormier.[3]
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Photo: Ronald Turbide
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Liste des décès de
la President :
- Eugène Turbide,
fils de Bénoni, époux de Marie Hubert, mort gelé des suites du naufrage après
avoir lutté pour monter la falaise. Il avait 12 enfants âgés de 1 à 20 ans.
- Alexandre
Turbide, fils aîné d’Eugène et Marie Hubert, mort dans les mêmes circonstances
- Samuel Cormier,
fils de Nicolas et époux de Philomène Turbide, père de 4 enfants de 1 à 10 ans
- André Desjardins,
fils de Jean-Baptiste et époux d’Henriette dit Archange Turbide. Il avait 10
enfants, âgés de quelques mois à 18 ans.
- Antoine Lafrance,
fils célibataire de Joseph et Sophie Bilodeau
- Alfred Bourgeois,
fils de Ferdinand et époux de Victorine Lapierre
MARIE-ANNE –
goélette (1 perte de vie)
Après être
presque entrée en collision avec la goélette Espérance à 4 heures du matin, la
goélette Marie-Anne, conduite par le capitaine François Thériault, tente d’alerter leur équipage: ils ont fait une fausse manœuvre et se
dirigent sur les côtes du Cap-Breton. Peine perdue, l’Espérance heurte un galet, une demie heure plus tard. La Marie-Anne s’en tire, mais un des marins est
emporté par un brisant :
Décès :
- Grégoire
Chevarie, époux de Victoire Thériault. Celle-ci est enceinte de huit mois.
Les goélettes
Painchaud et Flash s’échouent la même nuit, le long d’une plage
près de Scatarie Island. La goélette Arctique, propriété de Nectaire Arseneau,
évite de peu les rochers. Son équipage est également sauf.
Le retour
des survivants au port de Havre-aux-Maisons, le 15 décembre 1875, est une scène
de désolation, selon l’auteur Paul Hubert. Il s’est fait décrire le
récit par son propre père.
1. FONDS AP13.
Simone Gaudet. Chapitre 2 : Les Gaudet du Bassin dans La vie de
Donalda, 2003. Non paginé.
2. Daniel
Lebel a connu une fin tragique aussi.
3. Boudreau, Dennis M. « Then the Sea
Gave Up Her Dead…, » [Maritime Disasters : Samuel Cormier and the
Snowstorm of 1875], JE ME SOUVIENS, Vol. VI, # 1, Spring 1983,
pp. 11-48.
BOUDREAU, Dennis M. Dictionnaire généalogique des
familles des Îles-de-la-Madeleine, Québec, 1760-1948, 2001.
FONDS AC1 CENTRE D’ARCHIVES RÉGIONAL DES ÎLES.
Liste condensée des naufrages du Centre d’archives régional des Îles, 2011
GOUVERNEMENT DU CANADA. Bibliothèque de Pêches et
Océans Canada (consultée le 29 novembre 2020) https://waves-vagues.dfo-mpo.gc.ca/Library/40783339_1875.pdf
HUBERT, Paul. Les Îles de la Madeleine et les
Madelinots p. 153-156.
DE L’ORME, Jean-Claude et Avila LEBLANC Histoire
populaire des Îles de la Madeleine. p. 119-122.
LANDRY, Frédéric. Dernière Course, La Boussole, 1989
Note : Le XIXe siècle, journal quotidien
politique et littéraire écrit qu’une dépêche de Québec rapporte le naufrage
de 6 navires et 62 décès